samedi, novembre 16, 2013

Interview de Yannick Agnel : «Je m'éclate à Baltimore»


Le champion olympique et du monde du 200 m est comme un poisson dans l'eau dans sa nouvelle vie américaine.
Après des Mondiaux réussis au-delà de ses espérances cet été à Barcelone (titres sur 4x100 m et 200 m), Yannick Agnel a repris le chemin de l'entraînement le 2 septembre sous les ordres de Bob Bowman, l'ancien coach du légendaire Michael Phelps, à Baltimore. Une nouvelle vie pour le Français, épanoui dans et hors des bassins, loin des remous causés par son départ de Nice au printemps dernier.
Yannick, après un mois de prise de contact cet été, peut-on dire que l'aventure américaine a réellement débuté avec la reprise de l'entraînement début septembre ?
Yannick Agnel :Oui, l'aventure a même démarré très fort puisque que je m'entraîne désormais très dur. Cet été, je disais que l'aventure n'avait pas vraiment commencé car je n'étais pas complètement installé. C'était un mois et demi d'appoint. Aujourd'hui, ça fait plusieurs semaines que je m'entraîne à fond, que je suis définitivement installé dans mon appartement, que j'ai pris mes marques, tant dans la piscine qu'avec le groupe avec lequel je traîne en permanence ou dans la vie américaine...
Après avoir quitté Nice et Fabrice Pellerin, vous aviez hésité à participer aux Mondiaux en individuel. Avec le recul, vous ne devez pas regretter d'y être allé ?
Ça aurait été dommage de ne pas m'aligner en individuel, bien sûr. Mais la période était quand même assez spéciale... Remporter le 200 m était tellement inattendu... C'était un peu un coup de poker donc c'est vraiment génial. Mais aujourd'hui, j'ai tourné la page de ce qui s'est passé et je suis tourné vers l'avenir.
A Barcelone, vous déclariez qu'il était trop tôt pour renouer le contact avec Fabrice. L'avez-vous fait depuis ?
On ne s'est ni revu, ni reparlé. Je pense qu'il faut laisser le temps au temps. Les choses se démêleront d'elles-mêmes.
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Avez-vous le sentiment d'avoir grandi en tant qu'homme ces derniers mois ?
Oui, effectivement. J'aime l'idée de ne pas être spectateur de sa vie mais d'en être acteur. A Nice, j'étais acteur. Mais parfois, être acteur ne suffit pas car un acteur fait ce qu'on lui demande. J'ai eu un moment où j'ai eu envie d'être le compositeur, l'écrivain de ma vie et d'avoir la possibilité de vivre le sport comme j'ai toujours voulu le vivre avec une philosophie qui est celle du groupe ici, de Bob Bowman et, je pense, des Etats-Unis en général, qui est de s'entraîner sérieusement sans se prendre la tête. C'est essentiel pour moi.
J'ai eu un moment où j'ai eu envie d'être le compositeur, l'écrivain de ma vie
Quelle relation avez-vous avec Bob Bowman ?
On a une relation très sincère, très franche, faite de proximité mais aussi d'une distance qu'il sait garder de façon intelligente. Je suis ravi d'évoluer à ses côtés, j'en apprends tous les jours. On peut échanger avec lui sur la natation comme sur des choses qui n'ont rien à voir. C'est vraiment bien car ce serait bête en passant autant de temps ensemble chaque jour de ne pas échanger sur autre chose que notre "boulot."
Quels changements avez-vous constaté par rapport à ce que vous faisiez à Nice ?
C'est un peu plus dur et intense mais à part ça il n'y a rien qui change drastiquement. Le principal changement, c'est l'état d'esprit à l'américaine, l'émulation d'un groupe.
Combien êtes-vous dans votre groupe d’entraînement ?
On est une dizaine, un peu moins. La qualité prime sur la quantité. Conor (Ndlr : Dwyer, vice-champion du monde du 200 m à Barcelone derrière Agnel) est encore là. On se tire mutuellement la bourre à l'entraînement. C'est un bonheur d'évoluer avec lui et le groupe. C'est la personne avec qui j'évolue à l'entraînement qui est la plus rapide et qui me donne le plus de fil à retordre.
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C’est la première fois que vous vous retrouvez avec un compagnon d’entraînement de ce niveau. N’est-ce pas difficile à gérer ?
Il n'est pas question de le gérer. C'est juste un bonheur d'évoluer à côté de lui car il est motivant et motivé et qu'une certaine émulation se créé entre nous. On se tire mutuellement parfois au-dessus de nos limites à l'entraînement et si ça ne va pas, on s'encourage.
Croisez-vous souvent Michael Phelps qui a passé toute sa carrière à Baltimore, dans la piscine où vous vous entraînez ?
De temps en temps. Il vient parfois nager histoire de garder la forme. On a des relations amicales. Des fois, je lui demande des conseils sur la vie en général plus que sur la natation. Je n'ai pas l'habitude de demander des conseils, notamment dans mon domaine d'expertise. J'observe plutôt et je m'inspire de ce que les gens font.
Michael Phelps vient parfois nager histoire de garder la forme
Vous racontiez cet été que Michael avait une loge dans le stade des Ravens. Avez-vous eu le temps d’aller voir un match ?
Et non, pas encore ! Ça doit être une expérience et particulièrement avec les Ravens (Ndlr : vainqueurs du Superbowl la saison dernière) donc je pense le faire assez rapidement.
Aviez-vous déjà cet attrait pour les sports US où est-ce une découverte pour vous depuis votre arrivée ?
Le baseball je ne connaissais pas mais le foot US je connais assez bien et j'étais fan avant. Ça ressemble plus à un spectacle qu'à un sport à proprement parler. L'équipe de foot, c'est sacro-saint ici. Quand il y a un match, tout le monde s'habille en violet dans la ville. C'est marrant. Et le lendemain du match, tu ne parles pas d'autre chose que du match. C'est un peu comme le foot chez nous mais tout le monde fait partie des ultras (rire), du bambin au grand-père.
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Après les Mondiaux, vous vous êtes aligné sur des épreuves de papillon et de dos en Coupe du monde...
(Il coupe) Je continue à l'entraînement. Ça empire même (sourire). Je nage beaucoup en 4 nages ou dans les nages individuellement séparées. Ça me permet de m'améliorer de façon globale et quand tu augmentes ton niveau général, tu augmentes forcément ton niveau technique individuel. Je suis ravi de pouvoir travailler ainsi même si parfois c'est très dur et que je me retrouve souvent derrière (sourire).
Peut-on imaginer vous voir sur d'autres nages que le crawl ?
Pour l'instant, on est dans l'optique d'une amélioration globale mais c'est aussi une façon de ne pas fermer la porte à d'autres possibilités. Mais aujourd'hui, je maîtrise bien mieux les courses en nage libre que dans les autres nages donc il ne serait pas question, à moins d'une révélation divine, que je me mette au dos ou au papillon au même niveau de performance que ce que j'ai pu atteindre en crawl. Il me faudra probablement des années, une décennie même, pour arriver au niveau de Camille (Ndlr : Lacourt) et Jérémy (Ndlr : Stravius) en dos (rire). Je vais me concentrer sur les épreuves de crawl et ce sera bien suffisant, pour les grands championnats.
Pourquoi avez-vous choisi de faire l'impasse sur les championnats de France et d'Europe en petit bassin cet hiver ?
On s'est concerté avec Bob et c'est tombé sous le sens car il fallait quant même qu'à un moment de l'année je me mette à m'entraîner (sourire). Aller aux championnats de France impliquait un retour en Europe et Bob ne serait pas resté avec moi. Il était plus profitable pour moi que je reste m'entraîner. Je ne ferai qu'une seule compétition en Europe, le Duel in the pool, fin décembre à Glasgow. L'objectif principal de la saison, ce sont les championnats d'Europe à Berlin l'été prochain où j'ai envie de nager le 100, 200 et 400 m. C'est un beau challenge, quelque chose que j'ai toujours eu en tête et qui me motive.
Si vous deviez résumer votre vie aujourd’hui, que diriez-vous ?
C'est un peu la question qu'Astérix pose au scribe dans Astérix Mission Cléopâtre. Mais je ne vais pas faire le long monologue d'Edouard Baer (rire). Tout simplement, je suis heureux, bien dans ma peau, en bonne santé... Je m'éclate dans ce que je fais. J'ai enfin commencé des activités annexes aussi. Tout va super bien, je suis aux anges ici.
source : sport24

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